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Le 29 novembre, le documentaire Copenhague, la guerre du climat  fut présenté sur la troisième chaîne de la RTBF. A Copenhague, 192 Etats étaient réunis pour  sauver la planète du réchauffement climatique… ce fut un  échec.
Que signifie pour vous la notion de «construction durable» et qu’est-ce qui la caractérise?

Pour autant, la notion de durabilité n’est pas non plus synonyme de longévité, d’immobilisme ou de conservatisme architectural. A l’heure actuelle, bon nombre des matériaux traditionnels tels que l’acier, le verre ou le béton sont tout aussi recyclables et donc durables que les matériaux dits «écologiques» à base de bois ou de fibre naturelle par exemple.

Ce qu’il importe de viser dans cette démarche, c’est plutôt la flexibilité et l’adaptabilité de la solution structurelle proposée tout en considérant la consommation énergétique de mise en œuvre et d’utilisation.

Cette notion reflète-t-elle des avancées technologiques en matière de matériaux et d’équipements ou s’agirait-il plutôt d’évolution ou d’innovation dans la conception architecturale?

Sur le plan technique, on assiste à une évolution constante du secteur orientée favorablement vers cette nouvelle notion de «construction durable» puisque ces nouveaux marchés offriront très probablement des gros bénéfices.

Encore faut-il préciser l’amplitude du degré d’adaptation qui varie selon l’intervenant. Là où les industriels, très prospectifs, ont déjà réagis en développant de nouveaux produits adaptés aux caractéristiques du parc immobilier existant, les distributeurs semblent moins enclins au changement. Quant aux entrepreneurs, ce sont certainement les professionnels les plus difficiles à convaincre de la nécessité d’adapter leur pratique constructive.

Sur le plan architectural, il est certain qu’actuellement nous vivons une évolution fondamentale dans la conception du bâti. Au début du 20ème siècle, l’architecture attachait plus d’importance aux arts décoratifs qu’elle ne se préoccupait de son rapport à l’environnement extérieur.

Dans l’entre-deux guerres, l’architecture a consacré le concept minimaliste de machine à habiter, cher aux Modernistes, en « bannissant » les arts décoratifs et en proposant un rapport abstrait, distant, de son environnement extérieur. Néanmoins, il y avait une volonté de rapport à l’homme, et au plus grand nombre, qui n’est pas à négliger dans une approche « durable » des choses.

Par la suite, les postmodernistes ont remis au goût du jour les arts décoratifs et promu l’aspect purement conceptuel de l’architecture, en consacrant, hélas, une technologie particulièrement énergivore et polluante.

Nous assistons depuis peu, ici et là, à un changement de paradigme avec l’avènement d’une conception architecturale humaine, durable, et en relation forte avec son contexte. L’architecture récente du Voraalberg en Autriche, en est, aujourd’hui, une des plus belles preuves.

Mais selon moi, cela reflète avant tout une évolution des mentalités. De la part des citoyens en général, mais aussi et surtout des architectes. Le rôle de l’architecte s’est vu profondément modifié. Ainsi, le métier d’architecte est davantage synonyme de pratique déontologique alliant défense du maître d’ouvrage, relation avec les corps de métier et respect de l’environnement.

La perception que l’on a de l’architecte a aussi fortement évolué, passant graduellement d’un statut quelque peu distant vers celui d’accompagnateur et de conseiller.

Si l’on considère les impératifs financiers et techniques, cette notion est-elle applicable au parc immobilier bruxellois existant de manière réaliste?

Oui, bien sur, même si dans la pratique cela s’avère très difficile à réaliser tant les contraintes budgétaires des maîtres d’ouvrage peuvent être strictes. Ce sont évidement les maîtres d’ouvrage les plus conscientisés qui feront le plus de sacrifices, tant financiers que comportementaux, afin de s’adapter aux nécessités du développement durable.

Au delà de ces considérations financières et techniques, les maîtres d’ouvrage souhaitent, de plus en plus, maintenir en ville une qualité de vie habituellement rencontrée à la campagne. Pour le praticien, cela se concrétise par une isolation accrue sur le plan thermique mais aussi acoustique, des espaces peut-être moins équipés mais plus agréable à vivre et ouverts, voire prolongés, vers l’extérieur.  

Par ailleurs, l’adaptation progressive du bâti bruxellois existant reste la meilleure réponse au souhait de développement durable.

Face à la catastrophe annoncée de la péri-urbanisation qui s’est développée avec l’accroissement des moyens de transports individuels, une gestion durable du territoire urbain et sa densification sont, sans doute, la solution. En ce sens, l’adaptation et l’extension du bâti existant semblent être les solutions financièrement et techniquement les plus viables tout en préservant l’identité de la ville.

Vous qui êtes également enseignant en projet d’architecture, voyez-vous un intérêt à intégrer cette notion de «construction durable» dans le cursus universitaire?

L’enseignement de l’architecture est probablement en retard sur cette évolution des mentalités dont je parlais plus tôt.

A la faculté d’architecture, on assiste à un changement des mentalités au sein du corps professoral, mais il ne me parait pas être volontaire ou même fondamental. A l’atelier, ce sont toujours des notions de programme, de spatialité voire même d’usage qui sont débattues. Le conceptuel prime toujours sur les aspects pragmatiques et concrets de la construction, qu’elle soit durable ou non. L’atelier reste le lieu de la synthèse des connaissances dans la production du projet. Dès lors, on peut espérer des étudiants, que cette conscientisation aux thématiques environnementales soit antérieure à leurs études d’architecture, et donc développée dès le secondaire. Et que les réponses à y apporter soient prises en charge par des cours spécifiquement dirigés vers ces questions.

Force est de constater, cependant, que les jeunes étudiants sont encore toujours le reflet de cette «génération MTV» ou Internet, et semblent d’avantage influencés par les réalisations d’architectes abondamment publiés comme Liebeskind, Hadid, Calatrava ou autres stars.

Daniel LINZE
Architecte, Enseignant à la Faculté d’Architecture de l’ULB (Horta- La Cambre)

Pour moi, c’est avant tout une question de bon sens. Ce devrait être, aujourd’hui, une notion intégrée et partagée par tous. Les «écolos» ne doivent en effet pas être les seuls garants de la protection de notre environnement. Tout architecte un tant soit peu conscient des enjeux de ce siècle doit se positionner dans cette logique de construction durable.

Dans le métier que je pratique, il s’agit de livrer au maître d’ouvrage une construction répondant à ses attentes dans le respect d’un budget donné, mais aussi respectueuse de critères environnementaux et de nouvelles normes réglementaires.

La «construction durable» est-elle forcément synonyme d’écologie ou de basse consommation énergétique? 
Non absolument pas! La «construction durable» n’est certainement pas synonyme d’écologie au sens dogmatique du terme. Dans un premier temps, les maîtres d’ouvrage, demandent plutôt des solutions tant fonctionnelles qu’économiques, visant à anticiper les problèmes d’approvisionnement énergétique à venir (et donc de son coût). Les questions relatives au choix des matériaux, à leur nocivité, aux énergies grises ou à l’impact environnemental de la construction n’interviennent que dans un second temps. Et c’est d’ailleurs là un rôle essentiel de conseiller que l’architecte doit jouer